Depuis septembre, La Terrasse du 2e étage s’est transformée en Cabinet d’Artistes (voir le BIM ! 6).
La chorégraphe et danseuse Ruth Childs et la plasticienne Cécile Bouffard s’y sont installées pour développer leur projet de recherche Delicate People. Rencontre avec ces deux artistes lors de leur passage en septembre.
Le projet Delicate People a émergé lors d’étapes de recherches, au Centre culturel suisse de Paris, à La Becque, et puis enfin sur La Terrasse du Grütli. En quoi ces résidences transforment-elles votre approche ?
Travailler dans le cadre d’une résidence donne la possibilité d’avoir du temps sans pression de résultat : du temps pour discuter, pour faire des digressions, pour laisser de la place à l’intuitif et se libérer d’un processus de production et de monstration classique. L’objectif n’est pas d’aller vers un produit final mais de valoriser un processus. C’est particulièrement intéressant car ce projet émerge de la rencontre entre deux pratiques différentes. Au delà de nos disciplines, on amène chacune une pratique artistique plus générale qui est spécifique et particulière à nous-même. Ces temps de résidences nous permettent d’observer où les processus peuvent se rejoindre.
Est-ce difficile de travailler ensemble depuis des disciplines aussi différentes que la sculpture et la danse ?
À première vue, elles semblent assez éloignées. Cécile a une pratique de construction, Ruth du mouvement. Pourtant, elles sont toutes deux corporelles et totalement physiques. Le fait que nous venions de disciplines différentes nous permet de plonger dans la collaboration sans avoir de discours prédéfinis. On tâtonne… mais avec des expériences qui sont déjà bien ancrées. Être à deux nous amène à interroger puis faire tomber progressivement les préjugés sur ce qui peut être fait ou pas. On a dû recrééer nos codes, casser les barrières de certaines habitudes, comme par exemple désacraliser les moments de studio où reigne généralement le silence.
Comment se concrétise cette recherche collaborative ?
Nous n’avions jamais collaboré ensemble avant Delicate People, et la rencontre et le partage se
sont faits à des endroits pas forcément attendus. Ce sont surtout nos personnalités qui nous ont déplacées dans nos actes artistiques. La rencontre s’est faite davantage entre nous qu’entre des disciplines.
Le travail s’appuie sur un énorme brassage des références artistiques, des livres, des images, des choses qui nous touchent artistiquement. On analyse ces références sans la prétention d’être spécialistes dans quelque chose. Le travail se fait de manière organique, à vif. On laisse à chacune son espace de création : on produit, mais pas un produit figé.
Propos recueillis par Anne-Claire Adet