Habiter en Suisse le temps d’une semaine,

y être attendue / parce qu’invitée à y résider / à prendre sa place dans un théâtre en quête d’émulation artistique / Alors ça commence par / s’émouvoir de la présence des montagnes dans cette ville, traversée par l’eau verte / sourire au froid chaque matin / se réveiller face au Mont caché derrière les immeubles.

Le quartier des Grottes / je loge là, rive droite, tout près des miens / des épiceries asiatiques, des salons et des boutiques africaines, des restaurants orientaux / non loin des travailleur.euse.s du sexe / des dealers et des femmes de ménage / j’aime vivre ici / je m’y sens en sécurité.

Là-bas, rive gauche / ça pue l’assimilation, le fric transpire des bâtiments / ça pèse lourd la bourgeoisie où tout est blanc / ça manque.

Ici de l’autre côté du Rhône / j’éprouve la sensation d’être chez moi / iels me ressemblent / Genève, où sont-iels ? Les noir.e.s, les arabes, les asiatiques et les latino.a.s ? / Go Go Go !

Au théâtre / je rencontre Tidiani N’Diaye, poète de sa danse / je me sens proche des serveuses, très loin des artistes / Dans l’ascenseur, j’échange avec une femme de ménage racisée / souffle de vie. / Puis, quand Davide-Christelle Sanvee arrive, dans ce micro-monde du Grütli, nous sommes enfin deux femmes noires / je respire autrement. La radicalité isole / construit. / Comment entrer en lien lorsque vous vous trouvez sur des territoires inégaux ? / comment se parler ? / de quoi ? / avec qui ? / choisir ses interlocuteur.ice.s.

Mon installation-performance ne peut être réalisée dans ces conditions sanitaires / alors il me faut chercher ailleurs / pas loin / tout s’entremêle / c’est la loi des intersections / systèmes / dominations / pour en sortir je dois / non / il faudrait / non / j’explore / je fais confiance à mon instinct / je commence par je / jeter mon corps dans la matière territoire / j’observe / j’enregistre / je photographie / je documente.